"Comme des pierres vivantes..."
Etudes bibliques "en vue de la prédication"
Les études bibliques mensuelles ont repris.
Nous commençons avec le thème de l'Eglise. Mercredi 17 octobre nosu avons étudié Marc 9 versets 33 à 50.
Vous trouverez ici une présentation des apports qui ont été fait par le pasteur animant cette étude et à venir, les apports des membres du groupe, les pistes de lectures possibles.
Parce que l'Evangile est vivant et qu'il parle chaque jour à chacun.
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Introduction
Durant cette année
scolaire nous allons crée officiellement l'Eglise Protestante Unie
de France.
C'est l'occasion de
réfléchir à ce qu'est l'Eglise.
De quoi parle-t-on
lorsqu'on prononce le mot « église »?
Le
terme est directement dérivé du terme grec « ekklesia »
qui signifiait un rassemblement de petit taille et que l'on
prononcait d'ailleurs « eglésia » dans le grec ancien.
Le terme serai construit à partir de « kaleo »
signifiant « appeler » et de « ek »
signifiant « hors de, à partir de » (préposition
dénotant une origine (point d'où l'action ou le mouvement
procède)).
Ainsi, le mot porte en lui-même deux chemins de compréhension
possible : un petit groupe qui se coupe de ou bien qui est
appelé par quelqu'un, pour quelque chose?
Mais la réalité
actuelle est bien plus complexe grâce à l'histoire chrétienne qui
est venue accaparer ce mot et lui donner ainsi une signification bien
plus riche.
Dans le Nouveau
Testament le mot apparaît quelque fois sans être très courant. Il
est même rare dans les évangiles.
Il n'est pas présent
dans l'Evangile de Marc. Mais cela n'empêche pas que la thématique
soit présente en particulier dans les propos que Jésus adresse aux
disciples.
Introduction
à la péricope :
Contexte
large
Ce passage se situe
après le récit de la Transfiguration donc dans la seconde moitié
de l'évangile où les menaces contre Jésus s'intensifient et où
l'épreuve de la Passion s'approche.
Située entre la
deuxième annonce de la Passion (Mc 9,30-32) et la troisième
(Mc 10,32-34), la
péricope est incluse dans une série d’enseignements
destinés non pas à
la foule, mais aux disciples, aux Douze, sur ce qui fait
particulièrement
problème entre eux : un ordre de dignité entre disciples
(hiérarchie interne) et, plus largement, une légitimation du groupe
des disciples
(l’institutionnalisation
du groupe). Même quand il y a rencontre particulière
comme avec l’homme
riche (Mc 9,17-31) ou les pharisiens (Mc10,2), l’enseignement final
vise les douze disciples, qui sont porteurs dans cet évangile
des problèmes et
problématiques de la vie communautaire. Il s’agit du «temps
des disciples»,
d’un temps de formation par des enseignements pratiques
où le disciple est
appelé à vivre sa foi dans ses relations quotidiennes: au
sein de la
communauté des croyants (Mc 9,38-50), mais également au sein
de sa famille (par
exemple : mariage et divorce en Mc 10,1-12, ou quitter
père, mère,
frères, sœurs en Mc 10,29-30).
Deux problématiques
traversent ces enseignements : celle de la nouvelle
interprétation des
Ecritures, alors lues à travers la loi de Moïse (question sur le
divorce, les
commandements selon l’homme riche) et celle de l’appartenance
à un groupe. Notre
péricope 9,38-50 relève de la seconde problématique.
Contexte
proche
Marc 9,30 à 10, 45
est scandé à deux reprises par la question de «qui est le plus
grand», avec la démonstration d'un Royaume de Dieu ouvert à ceux
qui accueillent des enfants (9,36), puis à ceux qui sont comme les
enfants (Mc 10,13)
Apparemment, cette
question de l’accueil des petits fait problème au sein
du groupe des
proches disciples (les Douze, 9,35); elle ne sera pas résolue
puisqu'elle sera
reprise par la demande de Jacques et Jean (10,35-36). Jésus
y répondra, non
plus avec l’image de l’enfant, mais avec celle de l’esclave,
car la question n’est pas de qualifier qui est digne ou pas d’être
appelé disciple, ni d’établir un classement, mais d’essayer de
suivre le Christ et de le laisser faire «son travail».
Commentaires.
A
qui s'adresse-t-il ?
Passage qui semble
constitué de plusieurs phrases de Jésus pas forcément prononcées
en même temps mais rassemblées au moins dans la mémoire des
rédacteurs. D'où la nécessité de créer l'unité du passage par
des tournures de phrases et des conjonction répétées : « au
nom de » « celui qui »
Le texte, après
avoir évoqué les personnages de Jean et de Jésus, ainsi qu'un inconnu qui
chassait les démons au nom de Jésus, emporte le lecteur dans un
tourbillon de pronoms ou de mots faisant références à des personnages non
clairement définis : nous-moi-nous-vous-quiconque-ces (petits)-on-ta/ton/tu-chacun-vous.
Le passage rapide d’un pronom à l’autre peut provoquer non
seulement la question «qui est qui ?» mais aussi «et moi, suis-je concerné
?».
Qui
suivre ? Au
v.38 : récit de Jean qui vient dans une argumentation de Jésus
à propos de la place de chacun au sein du groupe des Douze. Jean
semble se poser la question de la place du groupe des Douze au sein
de la société.
Il ne pose pas de
question mais le récit souligne l'action des disciples, comme s'il
attendait la confirmation de leur action par Jésus.
« Il ne nous
suivait pas » : étonnant car c'est le seul endroit dans
les Evangiles où il est question de suivre le groupe des Disciples.
En plus, il s'agit
d'un « nous » dont Jésus ne fait pas partie !
Dan sl'Evangile de
Marc les miracles que Jésus accomplit sont des signes du Royaume.
Qu'en est-il si leur auteur n'appartient pas au groupe de ceux qui
suivent les disciples ? La logique de Jean est celle d'une
exclusive appartenance au groupe.
v.39 : Suivre
Jésus n’implique pas une appartenance au groupe qui le
suit sur le chemin, mais bien un agir
en son nom.
Jésus
recentre sur sa personne. Nul
besoin de groupe institué, une relation personnelle suffit pour que la confiance
(la foi) soit manifestée.
Qui
fait parti du groupe?
Verset 40 Jésus
revient au groupe des disciples pour le définir non de manière
exclusive, comme Jean, mais de façon inclusive : «qui n’est pas
contre nous est pour
nous». Nous sommes face à une définition très large de la communauté.
Matthieu 12,30 et
Luc 11,23 sont très différents car ils font dire à
Jésus : «celui qui n’est pas avec moi est contre moi». Matthieu et Luc
sont dans une logique d’intégration («avec»/meta), Marc est dans une
logique d’adhésion («pour»/uper). Pour Marc, les critères d’appartenance au
Christ sont réduits : agir en son nom, ne pas être contre suffisent; les
limites du groupe éclatent à tel point que personne ne peut savoir où elles
sont.
Enjeux
Comment être
chrétien?
L’Eglise, comprise
comme un rassemblement communautaire de disciples
du Christ, ne se
définit pas par des limites, des frontières mais par son
centre : Jésus
Christ; dans ce passage Jésus dit qu’agir en son nom suffit.
Du coup, il ne
s’agit plus de se poser la question de l’appartenance mais de
la reconnaissance :
- reconnaissance que
le Christ agit en l’autre (l’exorciste hors du groupe);
- reconnaissance que
l’autre m’accueille au nom du Christ (cf. celui qui
donne le verre
d’eau).
Pour Jésus, il n’y
a pas de «dedans» ou de «dehors» ou, alors, les frontières
sont brouillées
depuis le discours inaugural de son enseignement, le discours
sur les paraboles
et le pourquoi des paraboles (Mc 4).
Ce qui compte, ce
n’est pas de repérer le chrétien (qui l’est ou pas, plus ou
moins), mais de
repérer le Christ et la puissance de son nom qui fait entrevoir
le Royaume. Et
l’Eglise n’est pas le Royaume : Jésus répond aux Douze sur
la vie
communautaire (et même hardiment, dans les v. 42-50) mais rappelle
que l’essentiel
n’est pas la constitution d’un groupe, mais le surgissement
du Royaume dans le
présent.
On pourrait résumer
: ayez du sel, garder votre ardeur, vivez en paix avec
les autres et
n’empêchez pas les signes du Royaume de se manifester, car
vous ne contrôlez
pas cet avènement !
La
nature du disciple:
Jésus souligne
qu’un disciple du Christ peut être un petit qui a besoin d’un
verre d’eau. Donc
ce ne sont pas l’exploit ou l’échec qui font le disciple, mais
d’abord une
dépendance assumée au Christ : se reconnaître comme un
petit qui a besoin
d’un verre d’eau (comme le père de l’enfant épileptique
reconnaîtra un
autre manque : celui de la foi, Mc 10,28).
Personne ne peut
s’auto-proclamer disciple, c’est aussi le regard de l’autre
qui m’accueille...
qui dit que je suis du Christ.
Etre disciple,
c’est accepter d’être accueilli (par le Christ et par l’autre)
et du coup
être appelé à
accueillir, ou du moins à ne pas empêcher ni scandaliser.
La
foi est un pouvoir qui ne se possède pas
Le seul pouvoir
autorisé est : «ne l’empêchez pas» (cf. v. 39). L’exhortation
est reprise
concernant d’autres petits, les enfants (10,14). Ce pouvoir ne se
manifeste que si
l’on ne s’en sert pas. Le seul pouvoir des disciples, c’est la
responsabilité
d’apprendre à vivre avec les autres (en gardant le sel de leur
foi) et de savoir
reconnaître les signes du Royaume :
•
chez
l’autre, même s’il n’appartient pas «au groupe», car le
Royaume vient
et l’homme ne
sait comment,
•
ou
chez un de ces «petits qui croient» car le Royaume vient dans ce
qui
est petit et est
appelé à grandir.
La responsabilité
du disciple est que l’Eglise ne fasse pas écran aux surgissements
du Royaume, mais plutôt qu'elle y participe... petitement !
Pour la
prédication.
Un
texte pour un auto-examen communautaire
Ce qui nous saute
aux yeux (aux oreilles) sont les images violentes, le vocabulaire
étrange qui semble appartenir à un autre monde, ainsi que la
question
de l’exorcisme
qui n’appartient pas à notre culture protestante réformée.
Dans son langage, ce
texte nous prend à «rebrousse-poils», il nous pousse
à un auto-examen.
Car le débat demeure même si les langages diffèrent.
Par exemple : pour
nous, l’Eglise est-elle un club avec des adhérents ? Un
parti pour le
Royaume ? Un groupe d’action et de pression ? Qu’est-ce qui
fait l’appartenance
à un groupe ? A une Eglise ? La confession de foi, les
actions, l’impact
médiatique, la cotisation... ? Est-ce important de mettre
des limites à la
définition de l’Eglise ?
Aujourd’hui, nous
sommes très accros de l’identité, du repérage, du rite
d’appartenance,
un sentiment qui n’est pas le même pour ceux qui sont
chrétiens depuis
des générations, pour ceux qui ont choisi de l’être, ou pour
les pratiquants et
les distancés de nos vies d’Eglises locales.
Il y a ceux qui
portent l’Eglise, ceux qui s’en servent quand bon leur semble
(pour les baptêmes,
mariages ou enterrements...). Il y a ceux qui donnent
tout à l’Eglise
et s’imaginent que tous devraient en faire autant; et ceux qui
partagent leur
engagement entre l’Eglise et d’autres associations. Ces derniers
sont-ils moins chrétiens ?
Posées ou non, ce
sont des questions qui germent ou circulent parfois silencieusement
dans une Eglise et qui sont un bon ferment pour du conflit...
Pas facile à vivre
ou même à accepter ce rassemblement de fois hétéroclites
qu’est une
Eglise.
Un texte qui remet
en cause chacun
L’enseignement de
Jésus tutoie chacun, personne ne peut considérer qu’il
parle pour son
voisin ! Les images sont violentes; il n’est pas nécessaire de
les prendre au pied
de la lettre, mais ça fait mal quand même car chacun
peut se voir taxer
d’être l’intégriste de l’autre. La question, le problème
du pouvoir, est
finalement quelque chose d’intime; pour le résoudre, il faut
accepter un
face-à-face avec soi... Le Christ nous y invite et ça fait mal de
devoir s’arracher
à des convictions ou certitudes qui nous portaient, ça fait
mal quand on
s’imaginait bien faire.
La question est
aussi que ceux qui ont le pouvoir dans notre société ne sont
pas toujours au
service des autres. Dans l’Eglise, qu’en est-il du conseiller
presbytéral ou
paroissial, du pasteur, du catéchète et de bien d’autres ?
Pourquoi ai-je
accepté la charge que j’occupe et qu’est-ce que j’en fais ?
Comment savoir si
je ne suis pas occasion de chute pour quelqu’un ? Car
même en refusant
toute responsabilité, notre vie humaine, notre vie chrétienne
touche aux
relations humaines, et donc aux autres !
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